LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 82, paragraphe 2, et son article 83, paragraphe 1,
vu la proposition de la Commission européenne,
vu l’avis du Comité économique et social européen (1),
après consultation du Comité des régions,
après transmission du projet d’acte législatif aux parlements nationaux,
statuant conformément à la procédure législative ordinaire (2),
considérant ce qui suit:
(1) |
La traite des êtres humains constitue une infraction pénale grave, souvent commise dans le cadre de la criminalité organisée, et une violation flagrante des droits fondamentaux, expressément interdite par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Prévenir et combattre la traite des êtres humains sont des priorités aux yeux de l’Union et des États membres. |
(2) |
La présente directive s’inscrit dans le cadre d’une action menée à l’échelle mondiale contre la traite des êtres humains, qui comprend des mesures auxquelles sont associés des pays tiers, comme indiqué dans le «Document d’orientation générale sur le renforcement de la dimension extérieure de l’Union européenne dans le domaine de la lutte contre la traite des êtres humains; vers une action de l’Union européenne à l’échelle mondiale en faveur de la lutte contre la traite des êtres humains», approuvés par le Conseil le 30 novembre 2009. À cet égard, il convient que des actions soient menées dans des pays tiers dont les victimes sont originaires ou dans lesquels elles sont transférées, afin de sensibiliser l’opinion publique à ce phénomène, de réduire la vulnérabilité des victimes, de leur apporter aide et assistance, ainsi que de s’attaquer aux causes premières de la traite des êtres humains et de soutenir ces pays tiers dans la mise en place des législations adéquates pour la combattre. |
(3) |
La présente directive reconnaît que la traite des êtres humains comprend une dimension liée à l’égalité entre les sexes et que, dans de nombreux cas, les femmes et les hommes ne sont pas victimes de la traite pour les mêmes raisons. Il convient dès lors que les mesures d’assistance et d’aide soient elles aussi, s’il y a lieu, adaptées à cette dimension liée à l’égalité entre les sexes. Les facteurs qui incitent les personnes à quitter leur pays d’origine et qui les attirent vers leur lieu de destination peuvent varier selon le secteur concerné, par exemple le trafic des êtres humains pour l’industrie du sexe ou aux fins de l’exploitation de main-d’œuvre dans la construction, l’agriculture ou l’esclavage domestique. |
(4) |
L’Union s’est engagée à prévenir la traite des êtres humains et à lutter contre ce phénomène, ainsi qu’à protéger les droits des victimes. À cette fin, la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil du 19 juillet 2002 relative à la lutte contre la traite des êtres humains (3) et un plan de l’Union européenne concernant les meilleures pratiques, normes et procédures pour prévenir et combattre la traite des êtres humains (4) ont été adoptés. En outre, le programme de Stockholm — une Europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens (5) adopté par le Conseil européen fait de la lutte contre la traite des êtres humains une véritable priorité. Il y a lieu d’envisager d’autres mesures, telles qu’un soutien à l’élaboration d’indicateurs communs de l’Union aux fins de l’identification des victimes de la traite, au moyen de l’échange des bonnes pratiques entre tous les acteurs concernés et en particulier les services sociaux tant publics que privés. |
(5) |
Les services répressifs des États membres devraient poursuivre leur collaboration dans le but de renforcer l’efficacité de la lutte contre la traite des êtres humains. Une étroite collaboration transfrontalière englobant notamment l’échange d’informations et de bonnes pratiques, ainsi que le maintien d’un dialogue ouvert entre les autorités policières, judiciaires et financières des États membres, sont essentiels à cet égard. Il convient de favoriser la coordination des enquêtes et des poursuites dans les affaires de traite des êtres humains par une coopération renforcée avec Europol et Eurojust, la mise en place d’équipes communes d’enquête, ainsi que par la mise en œuvre de la décision-cadre 2009/948/JAI du Conseil du 30 novembre 2009 relative à la prévention et au règlement des conflits en matière d’exercice de la compétence dans le cadre des procédures pénales (6). |
(6) |
Les États membres devraient encourager et travailler en étroite collaboration avec les organisations de la société civile, et notamment les organisations non gouvernementales reconnues et actives dans le domaine concerné qui viennent en aide aux victimes de la traite, en particulier dans le cadre des actions destinées à orienter les politiques, des campagnes d’information et de sensibilisation, des programmes de recherche et d’éducation, et des actions de formation, ainsi qu’aux fins du suivi et de l’évaluation des effets des mesures de lutte contre la traite. |
(7) |
La présente directive adopte une approche intégrée et globale, fondée sur les droits de l’homme, de la lutte contre la traite des êtres humains et il convient, dans le cadre de sa mise en œuvre, de prendre en considération la directive 2004/81/CE du Conseil du 29 avril 2004 relative au titre de séjour délivré aux ressortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine et qui coopèrent avec les autorités compétentes (7) ainsi que la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (8). L’un des principaux objectifs de la présente directive est d’atteindre une plus grande rigueur dans la prévention, les poursuites et la protection des droits des victimes. La présente directive adopte également une compréhension contextuelle des différentes formes de la traite et vise à garantir que chacune de ces formes est combattue au moyen des mesures les plus efficaces. |
(8) |
Les enfants sont plus vulnérables que les adultes et courent, par conséquent, un risque plus grand d’être victimes de la traite des êtres humains. Lorsqu’il s’agit d’appliquer la présente directive, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale, conformément à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant adoptée en 1989. |
(9) |
Le protocole additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, adopté en 2000, et la convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, adoptée en 2005, constituent des avancées décisives sur la voie du renforcement de la coopération internationale contre ce phénomène. Il convient de noter que la convention du Conseil de l’Europe précitée comprend un mécanisme d’évaluation, composé du groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) et du comité des parties. Il y a lieu, afin d’éviter les doubles emplois, de soutenir la coordination entre les organisations internationales compétentes pour prendre des mesures visant à combattre la traite des êtres humains. |
(10) |
La présente directive ne porte pas atteinte au principe de non-refoulement conformément à la convention de 1951 relative au statut des réfugiés (convention de Genève) et est conforme à l’article 4 et à l’article 19, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. |
(11) |
S’attaquant aux récentes évolutions de la traite des êtres humains, la présente directive adopte une conception de la traite qui est plus large que celle adoptée dans la décision-cadre 2002/629/JAI et englobe donc d’autres formes d’exploitation. Dans le contexte de la présente directive, par «mendicité forcée», il y a lieu d’entendre toute forme de travail ou de service forcés tels que définis dans la convention no 29 de l’OIT concernant le travail forcé ou obligatoire de 1930. En conséquence, l’exploitation de la mendicité, y compris l’utilisation d’une personne à charge victime de la traite pour mendier, relève de la définition de la traite des êtres humains uniquement lorsque sont réunis tous les critères du travail ou des services forcés. À la lumière de la jurisprudence pertinente, la validité d’un consentement quel qu’il soit à fournir un tel travail ou service devrait faire l’objet d’une appréciation cas par cas. Toutefois, lorsqu’il s’agit d’un enfant, aucun consentement quel qu’il soit ne devrait être considéré comme valable. L’expression «exploitation d’activités criminelles» devrait s’entendre comme l’exploitation d’une personne en vue de commettre, entre autres, du vol à la tire, du vol à l’étalage, du trafic de drogue et d’autres activités analogues passibles de sanctions pénales et qui ont un but lucratif. Cette définition englobe également la traite des êtres humains à des fins de prélèvement d’organes, qui constitue une violation grave de la dignité humaine et de l’intégrité physique, ainsi que d’autres comportements tels que l’adoption illégale ou les mariages forcés, dans la mesure où les éléments constitutifs de la traite des êtres humains sont réunis. |
(12) |
Les niveaux de sanctions prévus dans la présente directive reflètent la préoccupation croissante que suscite parmi les États membres l’aggravation du phénomène de la traite des êtres humains. C’est pourquoi la présente directive utilise comme base les niveaux 3 et 4 des conclusions du Conseil des 24 et 25 avril 2002 sur l’approche à suivre en vue d’une harmonisation des peines. Lorsque l’infraction a été commise dans certaines circonstances, par exemple à l’encontre d’une victime particulièrement vulnérable, la sanction devrait être plus sévère. Dans le contexte de la présente directive, le vocable «personnes particulièrement vulnérables» devrait désigner, au minimum, tous les enfants. D’autres facteurs pourraient être pris en compte pour évaluer la vulnérabilité d’une victime, notamment son sexe, une grossesse, son état de santé et un handicap. Lorsque l’infraction est particulièrement grave, par exemple lorsque la vie de la victime a été mise en danger ou que l’infraction a comporté des actes de violence graves tels que des actes de torture, une consommation forcée de drogues ou de médicaments, un viol ou d’autres formes graves de violences psychologiques, physiques ou sexuelles, ou a causé un préjudice particulièrement grave à la victime, cela devrait aussi se traduire par une sanction plus sévère. Lorsque, dans la présente directive, une procédure de remise est mentionnée, il convient d’interpréter cette mention conformément à la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (9). La gravité de l’infraction pourrait être prise en compte dans le cadre de l’exécution de la condamnation. |
(13) |
Dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains, il convient d’utiliser pleinement les instruments existants en matière de saisie et de confiscation des produits du crime, tels que la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée et les protocoles s’y rapportant, la convention du Conseil de l’Europe de 1990, relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, la décision-cadre 2001/500/JAI du Conseil du 26 juin 2001 concernant le blanchiment d’argent, l’identification, le dépistage, le gel ou la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime (10), et la décision-cadre 2005/212/JAI du Conseil du 24 février 2005 relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime (11). Il y a lieu d’encourager l’utilisation des instruments et produits des infractions visées dans la présente directive qui ont été saisis ou confisqués aux fins de financer l’assistance aux victimes et la protection de celles-ci, et notamment leur indemnisation ainsi que les actions transfrontalières de lutte contre la traite qui sont menées au niveau de l’Union par les services répressifs. |
(14) |
Les victimes de la traite des êtres humains devraient, conformément aux principes de base des systèmes juridiques des États membres concernés, être protégées contre les poursuites ou les sanctions concernant des activités criminelles, telles que l’utilisation de faux documents, ou des infractions visées dans la législation sur la prostitution ou sur l’immigration, auxquelles elles ont été contraintes de se livrer en conséquence directe du fait qu’elles ont été victimes de la traite des êtres humains. Le but d’une telle protection est de garantir aux victimes le bénéfice des droits de l’homme, de leur éviter une nouvelle victimisation et de les inciter à intervenir comme témoins dans le cadre des procédures pénales engagées contre les auteurs des infractions. Cette protection ne devrait pas exclure que les personnes qui ont délibérément commis des infractions ou y ont volontairement participé fassent l’objet de poursuites ou de sanctions. |
(15) |
Afin d’assurer la bonne fin des enquêtes et des poursuites concernant les infractions de traite des êtres humains, l’ouverture de celles-ci ne devrait pas, en principe, dépendre d’une éventuelle plainte de la victime ou d’une accusation introduite par celle-ci. Lorsque la nature des faits le requiert, il conviendrait que les poursuites soient autorisées durant une période suffisamment longue après que la victime a atteint l’âge de la majorité. La durée de cette période devrait être déterminée conformément au droit national. Les agents des services répressifs et les ministères publics devraient recevoir une formation adéquate, notamment dans le but d’améliorer la coopération policière et judiciaire internationale. Les personnes chargées des enquêtes ou des poursuites concernant ces infractions devraient aussi avoir accès aux outils d’investigation utilisés dans les affaires relatives à la criminalité organisée ou à d’autres formes graves de criminalité. Ces outils pourraient comprendre l’interception des communications, la surveillance discrète, y compris électronique, la surveillance des comptes bancaires ou autres investigations financières. |
(16) |
Pour s’assurer que des poursuites efficaces soient engagées contre les groupes criminels internationaux dont le centre opérationnel est situé dans un État membre et qui se livrent à la traite des êtres humains dans des pays tiers, il convient d’établir la compétence d’un État membre à l’égard de l’infraction de traite des êtres humains lorsque l’auteur est un ressortissant de cet État membre et que l’infraction est commise en dehors du territoire de cet État membre. De même, la compétence relative à cette infraction pourrait également être établie lorsque l’auteur de l’infraction est une personne résidant habituellement dans un État membre, lorsque la victime est un ressortissant ou une personne résidant habituellement dans un État membre, ou lorsque l’infraction est commise au profit d’une personne morale établie sur le territoire d’un État membre et que l’infraction est commise en dehors du territoire de cet État membre. |
(17) |
Si la directive 2004/81/CE prévoit la délivrance d’un permis de séjour aux victimes de la traite des êtres humains qui sont ressortissants de pays tiers, et que la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres (12) régit l’exercice, par les citoyens de l’Union et leur famille, du droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, prévoyant notamment une protection contre l’éloignement, la présente directive établit des mesures de protection spécifiques applicables à toute victime de la traite des êtres humains. Par conséquent, la présente directive ne porte nullement sur les conditions de séjour des victimes de la traite des êtres humains sur le territoire des États membres. |
(18) |
Il est nécessaire que les victimes de la traite des êtres humains soient en mesure d’exercer leurs droits d’une manière effective. C’est pourquoi il conviendrait de leur apporter assistance et aide, avant et pendant la procédure pénale, ainsi qu’après celle-ci pour une période suffisante. Les États membres devraient prévoir des moyens pour financer l’assistance et l’aide aux victimes, ainsi que leur protection. L’assistance et l’aide apportées devraient comporter au moins un ensemble minimal de mesures qui sont nécessaires pour permettre à la victime de se rétablir et d’échapper aux auteurs de la traite. La mise en œuvre pratique de ces mesures devrait, sur la base d’une évaluation individuelle effectuée conformément aux procédures nationales, tenir compte de la situation, du contexte culturel et des besoins de la personne concernée. Une personne devrait bénéficier d’une assistance et d’une aide dès qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’elle pourrait avoir été victime de la traite des êtres humains et indépendamment de sa volonté d’intervenir comme témoin. Lorsque la victime ne réside pas légalement sur le territoire de l’État membre concerné, l’assistance et l’aide devraient être fournies sans condition au moins pendant le délai de réflexion. Si, après l’achèvement du processus d’identification ou l’expiration du délai de réflexion, la victime est considérée comme ne remplissant pas les conditions pour l’obtention d’un titre de séjour ou n’a pas par ailleurs de résidence légale dans cet État membre, ou si la victime a quitté le territoire de cet État membre, l’État membre concerné n’est pas obligé de continuer à lui apporter une assistance et une aide au titre de la présente directive. Si nécessaire, l’assistance et l’aide devraient se poursuivre pendant une période suffisante après la fin de la procédure pénale, par exemple si la victime reçoit des soins médicaux en raison d’un grave préjudice physique ou psychologique résultant de l’infraction ou que sa sécurité est menacée du fait de ses dépositions dans le cadre de cette procédure pénale. |
(19) |
La décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales (13) confère un ensemble de droits aux victimes dans le cadre des procédures pénales, y compris le droit à une protection et le droit à réparation. En outre, les victimes de la traite des êtres humains devraient avoir accès, sans retard, à des conseils juridiques et, conformément au rôle attribué aux victimes dans le système judiciaire concerné, à une représentation juridique, y compris aux fins d’une demande d’indemnisation. Ces conseils et représentations juridiques pourraient également être fournis par les autorités compétentes aux fins d’une demande d’indemnisation de l’État. Le but des conseils juridiques est de permettre aux victimes d’être informées et conseillées sur les différentes possibilités qui s’offrent à elles. Les conseils juridiques devraient être fournis par une personne ayant reçu une formation juridique appropriée, mais il n’est pas indispensable que cette personne soit un juriste. Les conseils et, conformément au rôle attribué aux victimes dans le système judiciaire concerné, la représentation juridiques devraient être fournis gratuitement, tout au moins lorsque la victime n’a pas de ressources financières suffisantes, selon des modalités compatibles avec les procédures internes des États membres. Étant donné qu’il est peu probable que les enfants victimes, en particulier, disposent de telles ressources, les conseils et la représentation juridiques seraient en pratique gratuits pour eux. En outre, les victimes devraient bénéficier, en fonction d’une évaluation individuelle des risques effectuée conformément aux procédures nationales, d’une protection contre toutes représailles ou intimidation et contre le risque d’être à nouveau victimes de la traite des êtres humains. |
(20) |
Les victimes qui ont déjà souffert des abus et des traitements dégradants que la traite des êtres humains implique généralement, tels que l’exploitation sexuelle, les sévices sexuels, le viol, des pratiques analogues à l’esclavage ou le prélèvement d’organes, devraient être protégées contre la victimisation secondaire et tout nouveau traumatisme au cours de la procédure pénale. Ainsi, toute répétition inutile des interrogatoires durant l’enquête, les poursuites et le procès devrait être évitée, le cas échéant, en réalisant, le plus tôt possible dans la procédure, un enregistrement vidéo de ces interrogatoires. À cette fin, les victimes devraient recevoir un traitement adapté à leurs besoins individuels, tout au long de l’enquête et de la procédure pénale. L’appréciation de leurs besoins individuels devrait tenir compte de circonstances telles que l’âge, une éventuelle grossesse, la santé, un éventuel handicap, ou d’autres situations personnelles, et des conséquences physiques ou psychologiques de l’activité criminelle dont la victime a fait l’objet. La décision d’appliquer ou non le traitement et selon quelles modalités est arrêtée cas par cas, dans le respect des critères définis dans leur droit national ainsi que du pouvoir discrétionnaire, de la pratique et des orientations des tribunaux. |
(21) |
Des mesures d’assistance et d’aide devraient être apportées aux victimes avec leur consentement informé. Il convient dès lors que les victimes soient informées des principaux éléments desdites mesures et que celles-ci ne leur soient pas imposées. Le refus par la victime du bénéfice des mesures d’assistance ou d’aide ne devrait pas entraîner d’obligation pour les autorités compétentes de l’État membre concerné de proposer à la victime des mesures de remplacement. |
(22) |
Les États membres devraient veiller à ce que, outre les mesures destinées à toutes les victimes de la traite des êtres humains, des mesures spécifiques d’assistance, d’aide et de protection soient offertes aux enfants qui en sont victimes. Ces mesures devraient être accordées dans l’intérêt supérieur de l’enfant conformément à la convention des Nations unies de 1989 relative aux droits de l’enfant. Lorsque l’âge d’une victime de la traite des êtres humains est incertain, et qu’il existe des raisons de croire qu’elle a moins de 18 ans, la personne en question devrait être présumée être un enfant et bénéficier de mesures immédiates d’assistance, d’aide et de protection. Les mesures d’assistance et d’aide destinées aux enfants victimes devraient viser à assurer leur rétablissement physique et psychosocial et à leur trouver une solution durable. L’accès au système éducatif favoriserait la réinsertion des enfants dans la société. Les enfants victimes de la traite étant particulièrement vulnérables, des mesures de protection supplémentaires devraient être prévues pour les protéger pendant les interrogatoires au cours de l’enquête et de la procédure pénale. |
(23) |
Une attention particulière devrait être accordée aux enfants victimes de la traite des êtres humains qui ne sont pas accompagnés, ces enfants ayant besoin d’une assistance et d’une aide spécifiques en raison de leur situation particulièrement vulnérable. Dès qu’un enfant non accompagné qui est victime de la traite des êtres humains est identifié et jusqu’à ce qu’une solution durable soit trouvée, les États membres devraient appliquer des mesures d’accueil adaptées aux besoins de l’enfant et veiller à l’application des garanties de procédure. Il y a lieu de prendre les mesures nécessaires pour garantir, le cas échéant, qu’un tuteur et/ou un représentant soit désigné afin de veiller à l’intérêt supérieur du mineur. L’avenir de chaque enfant victime qui n’est pas accompagné devrait faire l’objet d’une décision, prise dans les meilleurs délais, visant à trouver des solutions durables fondées sur une appréciation individuelle de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui devrait être une considération primordiale. Une solution durable pourrait consister dans le retour et la réintégration dans le pays d’origine ou le pays de retour, l’intégration au sein de la société d’accueil, l’octroi d’un statut de protection international ou l’octroi d’un autre statut conformément au droit national des États membres. |
(24) |
Lorsque, conformément à la présente directive, il y a lieu de désigner un tuteur et/ou un représentant pour un enfant, lesdites fonctions peuvent être remplies par la même personne ou par une personne morale, une institution ou une autorité. |
(25) |
Les États membres devraient élaborer et/ou renforcer leur politique de prévention de la traite des êtres humains, y compris les mesures destinées à décourager la demande qui favorise toutes les formes d’exploitation, et les mesures visant à réduire le risque d’être victime de la traite des êtres humains, au moyen de la recherche notamment sur les nouvelles formes de traite des êtres humains, de l’information, de la sensibilisation et de la formation. Dans le cadre de ces initiatives, les États membres devraient adopter une approche tenant compte des spécificités liées au sexe et des droits de l’enfant. Les fonctionnaires susceptibles d’entrer en contact avec des victimes et victimes potentielles de la traite des êtres humains devraient recevoir une formation adéquate afin d’être en mesure d’identifier ces victimes et de s’occuper d’elles. Il convient d’assurer la promotion de cette obligation de formation auprès des catégories de personnes suivantes, lorsqu’elles sont susceptibles d’entrer en contact avec des victimes: agents de police, gardes-frontières, agents des services de l’immigration, procureurs, avocats, magistrats et personnel des autorités judiciaires, inspecteurs du travail, travailleurs sociaux, personnel chargé de la protection des droits de l’enfant, personnel des services de soins de santé et personnel consulaire; ladite obligation de formation pourrait, eu égard aux circonstances locales, concerner aussi d’autres groupes de fonctionnaires susceptibles de rencontrer des victimes de la traite des êtres humains dans l’exercice de leurs fonctions. |
(26) |
La directive 2009/52/CE prévoit des sanctions à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier qui, même s’ils n’ont pas été inculpés ou condamnés pour traite d’êtres humains, utilisent le travail ou les services d’une personne tout en sachant que cette personne est victime de traite. En outre, les États membres devraient prendre en considération la possibilité d’infliger des sanctions aux utilisateurs des services d’une personne lorsqu’ils savent que cette personne est une victime de la traite des êtres humains. Une telle criminalisation plus large pourrait s’appliquer aux comportements des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour régulier et de citoyens de l’Union, ainsi que des utilisateurs de services sexuels fournis par une victime de la traite des êtres humains, indépendamment de leur nationalité. |
(27) |
Il convient que les États membres mettent en place, sous la forme qu’ils jugent appropriée conformément à leur organisation interne et en tenant compte de la nécessité de prévoir une structure minimale assurant des tâches spécifiques, des systèmes nationaux de suivi tels que des rapporteurs nationaux ou des mécanismes équivalents, afin d’étudier les tendances de la traite des êtres humains, de constituer des statistiques, de mesurer les résultats de la lutte menée contre cette traite et de rendre compte régulièrement. De tels rapporteurs nationaux ou mécanismes équivalents sont déjà constitués en un réseau informel au niveau de l’Union mis en place sur la base des conclusions du Conseil du 4 juin 2009 sur la mise en place, au sein de l’Union européenne, d’un réseau informel de rapporteurs nationaux ou de mécanismes équivalents dans le domaine de la traite des êtres humains. Un coordinateur européen de la lutte contre la traite des êtres humains devrait prendre part aux travaux de ce réseau, qui fournit à l’Union et à ses États membres des informations stratégiques objectives, fiables, comparables et actualisées dans le domaine de la traite des êtres humains et contribue à l’échange d’expériences et de bonnes pratiques dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la traite des êtres humains à l’échelon européen. Le Parlement européen devrait avoir la possibilité de participer aux activités communes des rapporteurs nationaux ou des mécanismes équivalents. |
(28) |
Dans le but d’évaluer les résultats des actions engagées pour lutter contre la traite des êtres humains, l’Union devrait poursuivre ses travaux sur les méthodologies et les méthodes de collecte de données permettant de produire des données statistiques comparables. |
(29) |
À la lumière du programme de Stockholm et en vue de mettre au point une stratégie consolidée au niveau de l’Union en matière de lutte contre la traite des êtres humains, qui aurait pour objet de renforcer encore la détermination et les efforts de l’Union et des États membres dans la prévention de la traite et la lutte contre ce phénomène, les États membres devraient faciliter l’accomplissement des tâches du coordinateur européen de la lutte contre la traite des êtres humains, dont, par exemple, l’amélioration de la coordination et de la cohérence, en évitant les doublons, entre les institutions et agences de l’Union ainsi qu’à l’égard des États membres et des acteurs internationaux, la contribution à l’élaboration des politiques ou de stratégies de l’Union, existantes ou à venir, qui participent à la lutte contre la traite des êtres humains, ou encore l’établissement de rapports destinés aux institutions de l’Union. |
(30) |
La présente directive vise à modifier et étendre les dispositions de la décision-cadre 2002/629/JAI. Étant donné que les modifications à apporter sont significatives par leur nombre comme par leur nature, il convient, pour plus de clarté, de remplacer la décision-cadre dans son ensemble à l’égard des États membres participant à l’adoption de la présente directive. |
(31) |
Conformément au point 34 de l’accord institutionnel «Mieux légiférer» (14), les États membres sont encouragés à établir, pour eux-mêmes et dans l’intérêt de l’Union, leurs propres tableaux, qui illustrent, dans la mesure du possible, la concordance entre la présente directive et les mesures de transposition et à les rendre publics. |
(32) |
Étant donné que l’objectif de la présente directive, à savoir la lutte contre la traite des êtres humains, ne peut pas être réalisé de manière suffisante par les États membres et peut donc, en raison de sa dimension et de ses effets, être mieux réalisé au niveau de l’Union, celle-ci peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité consacré à l’article 5 du traité sur l’Union européenne. Conformément au principe de proportionnalité tel qu’énoncé audit article, la présente directive n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. |
(33) |
La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus notamment par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et en particulier la dignité humaine, l’interdiction de l’esclavage, du travail forcé et de la traite des êtres humains, l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, les droits de l’enfant, le droit à la liberté et à la sûreté, la liberté d’expression et d’information, la protection des données à caractère personnel, le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, et les principes de légalité et de proportionnalité des délits et des peines. La présente directive vise notamment à assurer le plein respect de ces droits et principes, et doit être mise en œuvre en conséquence. |
(34) |
Conformément à l’article 3 du protocole sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Irlande a notifié son souhait de participer à l’adoption et à l’application de la présente directive. |
(35) |
Conformément aux articles 1er et 2 du protocole sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et sans préjudice de l’article 4 de ce protocole, le Royaume-Uni ne participe pas à l’adoption de la présente directive et n’est pas lié par celle-ci ni soumis à son application. |
(36) |
Conformément aux articles 1er et 2 du protocole sur la position du Danemark, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le Danemark ne participe pas à l’adoption de la présente directive et n’est pas lié par celle-ci ni soumis à son application, |
ONT ADOPTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE: